Fruits de débat et de manipulation politique, les flux migratoires ne sont pas constitués de 99% d’hommes.[1] Selon le Haut Commissariat aux Réfugiés, en 2017 et en 2018,[2] les femmes et les filles représentaient près de la moitié des exilés.[3] 

Ayant quitté leur pays pour fuir la guerre, la misère, les violences sexuelles, de genre ou étant en quête d’un avenir meilleur, les femmes sont de plus en plus nombreuses à emprunter les chemins de l’exil[4]. Les violences[5] forment un continuum dans la vie de ces femmes. Avant le départ’, les persécutions sont courantes dans des contextes de guerre, intra-communautaire ou intrafamilial.[6] Lors du parcours migratoire, il est presque impossible d’échapper aux abus.

L’exil est un danger permanent pour les filles et les femmes : mariage forcé, traite des êtres humains,[7] viol, esclavage domestique… En Libye, Dina témoigne du désespoir après que la guerre ait éclaté: “la femme elle a été violée, elle a été battue, la femme elle avait pas son mot à dire, elle était juste là à penser qu’est ce que je vais devenir demain?[8]. Arrivées en France en étant traumatisées par les persécutions qu’elles ont subies, leur prise en charge semble inexistante. Où sont les solutions apportées aux problématiques de santé sexuelle, santé mentale et psychologique de ces femmes ? Quelles sont les protections prévues pour ces dernières ?

Les exilés accèdent toutes et tous difficilement aux protections prévues par la loi dû au manque d’informations et à leur précarité administrative. Pour les femmes, subissant des discriminations et des violences supérieures à la population masculine, accéder à leurs droits est particulièrement compliqué. L’existence même de droits ne suffit pas à leur donner une force de protection réelle. Le système opaque de protection ne prend pas en compte le silence des femmes réfugiées sur les violences sexuelles subies, la perte d’identité sociale ou encore la barrière de la langue.

Nous déplorons l’absence d’accès aux soins de santé et d’accompagnement psychologique. “Il est absolument clairement établi que les violences ont un impact sur la santé des femmes voir même qu’elle les prive de quatre années de vie en bonne santé.”[9] Ghada Hatem,[10] créatrice de la Maison des Femmes à Saint-Denis, est la première femme à avoir mis en place un système de réparation des mutilations sexuelles à Paris en 2016. Aujourd’hui, seules les associations et ONG s’attachent à apporter les soins médicaux nécessaires à ces femmes victimes de viols, de mutilations sexuelles, dans des situations d’urgence gynécologique. Les Etats d’accueil tels que la France et l’Italie, membres du G7 et donc désignés comme étant  les pays les puissants de la planète, se doivent de prendre en charge des politiques de santé publique à l’attention de ces femmes et de la particularité de leur situation. Il en revient à ces États de généraliser un accès à la santé par une prise en charge médicale, gynécologique et psychologique inconditionnelle[11] de toutes les femmes en situation d’exil.

Nous tenons à rappeler qu’en France, seule la société civile s’attache à aider les femmes réfugiées. Les moyens alloués aux associations et ONG qui les accompagnent sont insuffisants. Les travailleurs sociaux ne sont pas suffisamment épaulés dans l’accompagnement des exilées. Ils se sentent démunis face à cette situation et doivent être écoutés.[12]

Nous voulons que les instances étatiques prennent conscience des difficultés que rencontre cette population et cesse l’invisibilisation des violences.[13] Au delà des persécutions de genre, les politiques doivent adopter une vision intersectionnelle des discriminations. Toutes les formes d’oppression sont à traiter : raciale, ethnique, sociale, économique, de genre. Démarginaliser ces femmes doit passer par des politiques d’accueil et des pratiques judiciaires antidiscriminatoires. Il est temps d’écouter les besoins et les attentes de ces femmes dans des situations de vulnérabilité sans égal.

NOTES DE BAS DE PAGE : 

[1]Se référer à l’article “Non Marine le Pen, 99% des réfugiés ne sont pas des hommes ni des migrants économiques”e [cf. source]

[2] Se référer au rapport de l’UNHCR, “Global trends forced displacement in 2018”, [cf. source]

[3] WomenIraq.JPEG, photo on VisualHunt.com

[4] Se référer à l’étude “Les violences à l’égard des femmes demandeuses d’asile et réfugiées en France”, une étude de France Terre [cf. source]

[5] Formation « PROVIDE »  PROximity in VIolence : Defense & Equity – suivi dans le cadre de la prévention et la lutte des violences contre les personnes réfugiées et demandeuses d’asiles les plus vulnérables.

[6] Inceste, viol, mariage forcé, mutilations sexuelles et génitales.

[7]Fait recruter, transporter, transférer, héberger ou accueillir une personne en ayant recours à la force, à la contrainte, à la tromperie ou à d’autres moyens, en vue de l’exploiter” selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime

[8] Citation de Dina, dans l’entretien de Léa Bordier intitulé exilées visualisable sur le site web d’hébergement vidéo Youtube [cf. sources]

[9] Citation de Ghada Hatem lors d’une interview, disponible sur le site web d’hébergement vidéo Youtube  [source]

[10] Ghada Hatem-Gantzer est une gynécologue-obstétricienne franco-libanaise. En 2016, elle fonde la Maison des Femmes à Saint-Denis, la première structure en France à offrir une prise en charge globale des femmes victimes de violences.

[11]Citation de Rana Hamra dans l’article “ le G7 2019 sera féministe ou ne sera pas !” [cf. source]

[12] Formation suivie dans le cadre du projet européen « PROVIDE »  PROximity in VIolence : Defense & Equity – dans le cadre de la prévention et la lutte des violences contre les personnes réfugiées et demandeuses d’asiles les plus vulnérables.

[13] se référer à l’étude de France Terre d’Asile d’Olga Bautista Cosa, “Les violences à l’égard des femmes demandeuses d’asile et réfugiées en France” [cf. source]

SOURCES :